Données de base

Selon une expertise destinée au gouvernement fédéral, les définitions statutaires du mot « archéologie » au Canada sont vagues15. Les traités internationaux16 et les lois fédérales sont peu utiles pour définir ce qu'est17 l'archéologie, et les lois provinciales manquent d'uniformité.

Toutefois, la définition de l'Agence Parcs Canada est assez précise :

(...) en archéologie, on met surtout l'accent sur des vestiges plus tangibles observés en surface, dans la terre ou sous l'eau... (un) site archéologique désigne les vestiges en surface ou les traces d'activités humaines dans la terre ou sous l'eau où par le biais de techniques archéologiques, il est possible d'en arriver à une compréhension de ces activités et à une gestion judicieuse de ces ressources... (un) artefact archéologique (est un) objet, composante d'un objet, fragment ou morceau d'un objet fabriqué ou utilisé par des hommes, un échantillon botanique, de sol ou d'autre intérêt archéologique18.

En pratique, il est généralement convenu que les objets dits « archéologiques » présentent trois caractéristiques :

  • ils se trouvent sur ou dans le sol,
  • ils sont liés à une activité humaine,
  • ils sont vieux.

Cependant, chacune de ces caractéristiques comporte des connotations distinctives ou des exceptions dans chaque province et territoire. Voici en résumé comment s'appliquent ces définitions.

Les objets se trouvent sur ou dans le sol (ou sous l'eau)

Sur terre, des fouilles sont nécessaires pour récupérer la plupart de ces objets19; cependant, les lois de tous les gouvernements, sauf un, indiquent qu'un objet archéologique peut se trouver dans ou sur la terre20.

Exceptions
  • L'Alberta exclut de la définition des « ressources archéologiques » les objets qui se trouvent sur le sol ou au-dessus du niveau du sol (encore qu'ils puissent être protégés en vertu d'un décret ministériel distinct), mais c'est le seul gouvernement à le faire21.

  • Dans deux provinces, certains objets trouvés au-dessus du niveau du sol sont également considérés comme « archéologiques » : l'Ontario et la Colombie-Britannique reconnaissent les gravures rupestres (pétroglyphes)22 - encore que l'on puisse soutenir que ces dernières, à l'instar des peintures rupestres, sont par ailleurs visées par la loi de chaque province car elles font partie de la paroi rocheuse, et donc du sol. La Colombie-Britannique reconnaît également les gravures sur des arbres (« arbres modifiés pour des motifs culturels »)23.

  • Une autre exception isolée se trouve dans la loi de la Nouvelle-Écosse, où l'« archéologie » ne s'applique pas aux métaux travaillés et aux bijoux enfouis dans le sol; ces objets sont visés par une catégorie juridique distincte24, dite « trésor trouvé ». Cependant, le traitement des travaux de recherche et des découvertes, en ce qui a trait à ces trésors trouvés, est fort similaire d'un point de vue juridique : un permis doit être obtenu avant les travaux, les découvertes doivent être signalées, etc.
Les objets sont vieux

D'après un traité international, les objets peuvent être considérés comme des « objets d'antiquité » s'ils ont plus de 100 ans d'âge25; dans un rapport fédéral, un seuil de 75 ans est avancé26 tandis qu'un autre règlement fédéral, la Nomenclature des biens culturels canadiens à exportation contrôlée, précise27 que bien que le seuil relatif à la plupart des biens culturels que vise la nomenclature soit de 50 ans, celui qui s'applique à un « objet archéologique » est de 75 ans28. À une exception près, les lois provinciales et territoriales ne précisent aucun seuil quant à l'âge que doit avoir un objet pour être considéré comme « archéologique ». Presque toutes les lois protègent les restes humains (indépendamment de leur âge), mais ne précisent pas l'âge des autres objets29. Elles indiquent simplement que l'objet doit présenter un intérêt « archéologique », « préhistorique », « historique » ou « patrimonial » — sans définir ces termes30. La loi de la Colombie-Britannique fait exception par trois dispositions. L'article 1 garantit la protection généralisée (et un peu vague) de tous les objets qui présentent une « valeur patrimoniale »; l'alinéa 13(2)d) garantit la protection absolue des artefacts qui datent d'avant 1846 et des artefacts d'autres époques stipulées dans le règlement; enfin, lorsqu'il n'est pas certain qu'un objet répond aux critères susmentionnés, il est protégé en vertu de l'alinéa 13(2)g).

Les objets sont liés à une activité humaine, mais...

L'archéologie, selon les définitions habituelles, vise les objets façonnés ou utilisés par les humains — voire les restes humains. Faut-il donc supposer que ces définitions excluent les restes d'animaux ou de plantes préhistoriques (fossiles, ossements de dinosaure, etc.)? Quelles sont les obligations à l'égard des objets paléontologiques (c'est-à-dire qui proviennent d'animaux ou de plantes préhistoriques)? Dans l'exercice du droit, la distinction entre l'archéologie et la paléontologie est généralement plus apparente que réelle. Même si la plupart des lois ne considèrent pas que les deux termes sont synonymes, elles accordent néanmoins la même protection aux objets de l'une et l'autre catégorie.

C'est ce que font explicitement les lois fédérales31 et celles de la Nouvelle-Écosse, du Manitoba, de la Saskatchewan, de l'Alberta et du Yukon32. Il semble que ce soit aussi le cas, implicitement, en Colombie-Britannique et en Île-du-Prince-Édouard33. À Terre-Neuve et au Labrador, la loi englobe aussi la paléontologie, encore qu'un peu différemment34. Il reste ainsi l'Ontario, le Nouveau-Brunswick et les Territoires du Nord-Ouest, où le sujet n'est tout simplement pas abordé35, et le Québec, où la paléontologie est expressément exclue du traitement juridique de l'archéologie36 Toutefois, en cas de découverte paléontologique survenant même dans une province où la loi est vague, il serait prudent de traiter l'objet en question comme s'il s'agissait d'une trouvaille archéologique.

Date de modification :