Une pierre à la fois : Projet de conservation de Province House

Lieu historique national Province House

Le Stone by Stone est un bulletin d’information périodique qui présente les histoires de Province House et les efforts déployés pour sauver cette pièce emblématique de notre patrimoine culturel.

Articles en vedette

Les étudiants du Collège Holland restaurent et réinstallent les fenêtres patrimoniales au lieu historique national Province House.

Des étudiants réalisent le processus complexe de réinstallation de ces fenêtres centenaires au lieu historique national Province House. 

Dans le cadre d’un partenariat avec Parcs Canada, les étudiants du programme de menuiserie patrimoniale du Collège Holland ont restauré et réinstallé avec beaucoup de soin deux des fenêtres originales du lieu historique national Province House. 

Les étudiants ont amorcé ces travaux de conservation unique en leur genre en 2019. Le processus consistait à désassembler les fenêtres, y compris les carreaux en verre, le mastic et la peinture pour examiner l’état des cadres de bois dénudés. Ils ont déterminé ce qu’il fallait remplacer, ils ont dû fabriquer le nécessaire et procéder à l’installation. Ils ont dû également reconstruire les cadres des fenêtres en installant le verre et le mastic avant de les repeindre avec de l’huile de lin. L’étape finale, soit la réinstallation des fenêtres, a eu lieu du 2 au 6 mai.

savoir plus...

Les fenêtres conservées par les étudiants sont les originales du bâtiment, construit de 1843 à 1847. En tout, il y a 101 fenêtres à restaurer. De ce nombre, 99 fenêtres ont été envoyées à une installation spécialisée en Ontario. Les deux autres fenêtres ont été restaurées par les étudiants du programme.

Situées à la gauche de l’entrée principale du bâtiment, les fenêtres se trouvent parmi les premiers éléments que les visiteurs pourront apercevoir une fois que le bâtiment sera à nouveau accessible au public.

 

Nicolle Gallant, gestionnaire de projet au sein de l’Unité de gestion de l’Î.-P.-É. à Parcs Canada (à droite), et Heather Harris, étudiante du programme de menuiserie patrimoniale du Collège Holland, au lieu historique national Province House, où les étudiants ont procédé à la réinstallation complexe de ces fenêtres centenaires en mai 2022. Mme Harris est l’une des quatre étudiants diplômés du programme de menuiserie patrimoniale qui ont été embauchés pour aider à réinstaller les autres fenêtres du lieu. 


Cette rare expérience de formation pratique en milieu de travail est devenue une occasion d’apprentissage incroyable pour les étudiants du programme de menuiserie patrimoniale, comme Heather Harris.

Originaire de Kensington, en Île-du-Prince-Édouard, Mme Harris était l’une des 16 étudiants qui ont participé cette année à la reconstruction et à la peinture des cadres de fenêtres. Elle a également participé au processus compliqué de la réinstallation sur place. 

« Je devais contribuer à un chapitre de l’histoire, a dit Mme Harris. Jamais, je n’aurais imaginé faire partie d’un tel projet. Je pense que c’est vraiment spécial que le Collège Holland ait collaboré avec Parcs Canada sur ce projet. »

Mais, ce projet n’a pas été de tout repos. Par exemple, l’ajout des coupe-froid aux fenêtres a représenté un défi. Ce procédé a été introduit en 1880, peu de temps après la construction du lieu historique national Province House. Les coupe-froid améliorent l’efficacité énergétique en réduisant les fuites d’air et en empêchant l’humidité extérieure de pénétrer dans les fenêtres. 

Selon Mme Harris, le coupe-froid a ajouté environ un huitième de pouce de chaque côté des fenêtres et, par conséquent, celles-ci ne rentraient pas tout à fait dans le cadre. 

« Nous avons dû faire de petits ajustements ici et là pour faire rentrer les fenêtres, ce qui a demandé un peu de travail », a-t-elle expliqué. 

Josh Silver, gestionnaire de l’apprentissage pour le programme de menuiserie patrimoniale, a expliqué que le plan original était de conserver et de réinstaller les fenêtres avec une cohorte d’étudiants, mais en raison de la pandémie de COVID-19, environ 45 étudiants seulement ont eu la chance d’être inclus dans le projet.   

« À titre d’enseignant, je n’aurais pas pu demander mieux, a mentionné M. Silver. C’est un projet qui se trouvera sur le curriculum vitae de nos diplômés pour le restant de leur vie. »

Des étudiants du programme de menuiserie patrimoniale du Collège Holland examinent l’état des cadres de bois dénudés. Les travaux de conservation des fenêtres ont commencé en 2019, sous la direction de Josh Silver, responsable de l’apprentissage pour le programme de menuiserie patrimoniale. Au printemps, des étudiants ont réinstallé les fenêtres au lieu historique national Province House.

Grâce à ce partenariat inestimable, Mme Harris est l’une des quatre étudiants diplômés du programme de menuiserie patrimoniale qui ont été embauchés par Heritage Grade (le sous-traitant responsable de la restauration et de la réinstallation des fenêtres) pour aider à réinstaller les fenêtres restantes du lieu historique national Province House. 

« Parcs Canada est exceptionnellement fier de cette collaboration, qui permet de susciter un sentiment d’appartenance et de fierté chez les étudiants qui ont contribué à la conservation de ces fenêtres d’une valeur culturelle et architecturale incommensurable », a déclaré Karen Jans, directrice de l’Unité de gestion de l’Î.-P.-É. 

Parcs Canada et le Collège Holland examinent actuellement comment les étudiants du programme de menuiserie patrimoniale pourraient participer à la troisième phase du projet de conservation. 

« Mes étudiants et moi avons eu une merveilleuse expérience, a ajouté M. Silver. Ils ont ouvert les portes et déroulé le tapis rouge. L’apprentissage et l’éducation que mes étudiants ont reçus au fil des ans sont sans égal. »


L’amour du métier : Robert Morrison est un expert dans son domaine. Il compte 41 années d’expérience dans le secteur de la maçonnerie en pierres.

Robert Morrison aime relever les défis lorsqu’il s’agit de pratiquer l’un des plus vieux métiers du monde.

Morrison, originaire de Bristol, en Angleterre, possède 41 ans d'expérience comme maçon en pierres. Il a travaillé sur divers bâtiments historiques au Canada et au Royaume-Uni. 

Deux cent cinquante heures plus tard, Morrison a achevé l’une des œuvres les plus difficiles sur le plan technique de toute sa carrière – le chapiteau ionique pour le projet de conservation du lieu historique national Province House. 

« Ce fut un travail particulièrement complexe », dit Morrison. « Un tel ouvrage, ça n'arrive qu’une fois dans une vie. »

savoir plus...

En plus d’être maçon en pierres, Morrison est aussi dessinateur agréé en conception assistée par ordinateur. Il agit également comme directeur de production pour RJW Stonemasons, l’entrepreneur qui réalise les travaux de maçonnerie pour le projet de conservation du lieu historique national Province House.

Les travaux de maçonnerie ont débuté à l’automne 2018 et se poursuivent. Environ 2 500 réparations de la pierre sont effectuées au moyen des mêmes outils que ceux utilisés lors de la construction de l’édifice Province House entre 1843 et 1847 : un marteau et un ciseau. 

On procède également au remplacement de 1 300 pierres extérieures. Morrison a aidé à dessiner, à couper et à façonner la pierre de Wallace, en Nouvelle-Écosse, qui est utilisée pour les murs extérieurs de l’édifice. 

Selon Morrison, ce qui a rendu la sculpture du chapiteau ionique si difficile est la taille même de la pierre et le fait que cette œuvre s’est avérée unique en son genre parmi toutes les recherches faites par le maçon. 

Un chapiteau ionique est la partie supérieure d’une colonne sur une façade (la structure aux allures de porche aux entrées des bâtiments symétriques de conception classique). L’édifice du lieu historique national Province House compte huit chapiteaux ioniques. Si ces derniers semblent être de style classique, les volutes (l’ornement aux allures de banderole sur le chapiteau ionique) ont une taille et une proportion considérablement différentes de celles utilisées dans les méthodes traditionnelles.

Par conséquent, Morrison a dû trouver manuellement le centre de chaque courbe qui forme des spirales dans les volutes, créer son propre gabarit, puis mesurer avec précision chaque section et la sculpter à la main. 

Il n’y a aucune marge d’erreur dans ce travail délicat.

Morrison explique : « Il faut avoir les idées claires et penser trois ou quatre coups d’avance pour éviter de couper quelque chose dont on pourrait avoir besoin plus tard. »

Robert Morrison sculpte les volutes (ornement aux allures de banderole sur la pierre du chapiteau ionique) au lieu historique national Province House.

Morrison a amorcé sa carrière de maçon en pierres en 1980. Il a tout de suite été fasciné par ce métier. Il a travaillé au palais de Westminster (construit en 1016), au palais de Buckingham, au Balliol College à Oxford et à plusieurs cathédrales importantes en Angleterre. 

Morrison et une équipe de maçons en pierres sont déménagés au Canada en 1986, dans le cadre d’un contrat de 22 mois, pour aider à redynamiser le secteur de la maçonnerie en pierres. À ce moment, de nombreux bâtiments historiques au pays avaient grandement besoin d’être restaurés.

Pour leur premier projet, ils ont travaillé à l’édifice de l’Assemblée législative de la Nouvelle-Écosse (que l’on appelle également Province House). L’équipe a pris sous son aile 12 employés locaux pour leur apprendre les techniques traditionnelles de la maçonnerie en pierres.

Morrison a par la suite fait du Canada son pays de résidence et a travaillé sur divers bâtiments historiques. Parmi ses projets récents, mentionnons le lieu historique national Province House et la cité parlementaire. 

Morrison dit que le chapiteau ionique au lieu historique national Province House est une véritable œuvre de portfolio.

À propos de l’achèvement du chapiteau ionique, Morrison déclare : « J’éprouve une grande fierté. L’occasion d’avoir pu travailler sur cette œuvre est tout à fait unique. »

Lorsque Morrison réfléchit à sa carrière de maçon en pierres, il n’a aucun regret.

« J’ai apprécié chaque minute de ma carrière, dit-il. Si vous aimez ce que vous faites, vous n’aurez jamais l’impression de travailler. »

Qu’est-ce qu’un chapiteau ionique?

Un chapiteau ionique est la partie magnifiquement ornée qui coiffe une colonne. Au lieu historique national Province House, le bâtiment compte huit colonnes situées sur les façades nord et sud. Le chapiteau ionique au coin sud-ouest de la façade sud devait être remplacé dans le cadre du projet de conservation du lieu historique national Province House.

Les mystères du lieu historique national Province House

À chacun sa marque

En juillet 2020, lorsqu’un maçon retirait une petite pierre du jambage de porte à l’entrée sud est, il a trouvé quelque chose d’inhabituel : une feuille de polyéthylène qui se trouvait entre le jambage de porte et la pierre située tout juste derrière.

savoir plus...

 

La sculpture donne l’impression d’être un moule en trois dimensions.

Après avoir enlevé la feuille de polyéthylène, le maçon a découvert, à sa grande surprise, une sculpture représentant un visage humain. La pierre était censée être remplacée; c’est pourquoi on peut voir des marques de perçage autour du visage, mais, heureusement, ces marques n’ont pas endommagé l’œuvre tout à fait particulière.

La sculpture donne l’impression d’être un moule en trois dimensions. Les yeux du visage souriant sont tournés vers le côté, son nez et ses joues ressortent légèrement, et des mèches de cheveux encadrent le visage. Une des joues a un pigment rocheux original, lui donnant un teint rosé.

En raison de la feuille de polyéthylène et de l’utilisation plus récente de mortier, on se demande si le visage a été sculpté par un des maçons en pierres de la construction (James Watts, William Bain ou Francis McDuff), puis enlevé et réinstallé au cours de rénovations ultérieures, ou s’il a plutôt été taillé par un autre maçon plus tard dans l’histoire du bâtiment.

Il est fort probable que nous ne saurons jamais vraiment qui l’a sculpté, mais nous pouvons supposer que quelqu’un a voulu laisser sa marque en créant un moule de son propre visage dans la pierre. Tout ce qu’on peut dire, c’est que la personne qui l’a fait avait un bon sens de l’humour et ne pensait pas qu’on découvrirait son œuvre.

La série Profils

Malve Petersmann

Malve Petersmann est gestionnaire de projet de l’Expérience du visiteur au sein de l’équipe du Service national de réalisation de projets à Parcs Canada.

Mme Petersmann, qui vit à Kjipuktuk, Miꞌkmaꞌki, aussi connu sous le nom de Halifax, en Nouvelle-Écosse, travaille depuis plus de 17 ans à Parcs Canada, où elle a occupé différents postes liés à l’Expérience du visiteur.

savoir plus...
 

Elle s’est jointe à l’équipe responsable du projet d’exposition de Province House à l’été 2019 pour participer à la quatrième et dernière partie du projet : la conception, l’élaboration et l’installation de la nouvelle expérience du visiteur offerte au lieu historique national Province House. 

Son travail consiste à s’assurer que les bonnes personnes sont assises autour de la table du projet au bon moment, notamment les experts en la matière, les historiens et les conservateurs, les rédacteurs et les traducteurs, les concepteurs, les fabricants et les intervenants.

« Quand on organise une exposition, il y a une suite d’étapes à traverser pour accomplir le travail, et je suis responsable de voir au respect de cette séquence des travaux », explique Malve Petersmann. « Je fais en sorte que les discussions entre les principaux membres de l’équipe responsable du projet d’exposition de Province House aient lieu pour que la prise de décisions soit efficace et que le projet avance bien ».

Elle est également responsable de la livraison des expositions dans le respect du budget et des délais, mais elle constate que cette responsabilité prend une tout autre ampleur lorsqu’il s’agit d’un projet d’interprétation.

« Vous devez vous assurer que les histoires à transmettre le sont d’une manière inclusive, respectueuse et précise, et que les méthodes que vous utilisez correspondent aux besoins et aux préférences de vos publics cibles afin que les visiteurs s’investissent facilement dans l’expérience, qu’ils soient touchés et inspirés en visitant l’exposition ».

Le projet d’exposition de Province House est l’un des plus grands projets auxquels elle a été affectée au cours de sa carrière à Parcs Canada, non seulement par sa portée, mais aussi par l’importance du sujet.

« Je pense que pendant le déroulement du projet, l’équipe responsable du projet d’exposition de Province House est devenue de plus en plus consciente que beaucoup de perspectives, d’opinions et d’expériences ont traditionnellement été exclues de la façon dont Parcs Canada a représenté certaines histoires », a déclaré Mme Petersmann. « Nous avons utilisé le Cadre pour l’histoire et la commémoration de Parcs Canada comme guide pour modifier la façon dont nous représentons les histoires racontées à Province House ».

Le Cadre pour l’histoire et la commémoration est un document qui a été publié en 2019 pour présenter des principes directeurs et des pratiques guidant la façon dont Parcs Canada communique l’histoire du Canada (https://www.pc.gc.ca/fr/lhn-nhs/plan/cadre-framework). Ce guide a été élaboré à la suite du rapport de la Commission de vérité et de réconciliation du Canada. Il comprend des appels à l’action visant à orienter la façon dont le gouvernement canadien compose avec les répercussions encore bien présentes des pensionnats sur les survivants et leurs familles.

L’une des principales approches utilisées par l’équipe du projet d’exposition de Province House dans l’élaboration des expositions repose sur la création de plusieurs comités consultatifs et sur un dialogue avec les communautés autochtones locales et nationales ainsi que d’autres communautés d’intérêts, qui ont généralement été sous-représentées et exclues des histoires racontées au lieu historique national Province House.

« Nous avons eu de nombreuses conversations très profondes, honnêtes et fructueuses avec des experts du patrimoine culturel autochtone d’un bout à l’autre du pays, et nous avons collectivement tiré des leçons de plusieurs de ces rencontres qui se sont avérées être de grandes épiphanies, des prises de conscience sur l’histoire que nous représentons sur ce site ».

Selon Mme Petersmann, ce projet est une excellente occasion pour Parcs Canada de montrer sa volonté de prendre des mesures en faveur de la réconciliation, non seulement avec les communautés autochtones, mais aussi avec d’autres communautés marginalisées.

Elle décrit sa participation à ce projet comme une expérience d’apprentissage incroyable, totalement gratifiante et enrichissante.

« Je me sens privilégiée de travailler avec l’équipe du projet d’exposition de Province House que nous avons constituée, et je me sens très soutenue dans le travail que nous accomplissons », a-t-elle exprimé. « J’ai été très touchée par l’envergure du soutien que nous avons reçu de la part des différents ministères et de la haute direction de Parcs Canada ».

Mme Petersmann espère que le nouvel espace d’exposition sera accueillant pour chacun et que tous les visiteurs repartiront inspirés.

« Notre espoir est que les visiteurs quittent l’expérience en ayant vraiment le sentiment d’avoir appris quelque chose qu’ils ne savaient pas, qu’ils ont eu une grande prise de conscience ou une expérience transformatrice, et qu’ils repartent avec un sentiment d’avoir joué un rôle, remplis d’espoir pour la suite des choses au Canada. »

Date de modification :